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Montagnes sans neige : le défi climatique bouleverse le ski européen

Les stations de ski européennes face à une menace grandissante : le réchauffement climatique. Quel avenir pour cette industrie emblématique ?

Montagne sans neige Penser Demain
Le manque de neige dû au réchauffement climatique inquiète les stations de ski.

Les montagnes européennes, jadis couvertes de neige, pourraient bientôt se transformer. Le coupable ? Le réchauffement climatique qui menace une industrie emblématique. 

Le déclin silencieux des stations de ski

L’image est frappante : décembre 2022, la moitié des domaines skiables français est déserte, privée de son manteau blanc. Cette scène n’est pas isolée. Depuis 1971, les Alpes ont perdu près de 30 jours d’enneigement sous les 2 000 mètres. Et la majorité des domaines skiables se trouve en dessous de cette altitude. Les chiffres sont alarmants : 168 stations ont fermé leurs portes depuis 1951. Pourtant, face à ce défi, les stations se tournent vers des solutions temporaires, comme les canons à neige. Mais ces machines, gourmandes en eau et en énergie, sont loin d’être la panacée. D’autant plus que leur utilisation est contestée, comme en témoignent les actes de sabotage à La Clusaz et aux Gets.

Le Grand-Bornand, Auvergne-Rhône-Alpes

La revue Nature Climate Change a livré un constat alarmant le 28 août 2023. Si la température mondiale augmente de +4°C, presque toutes les stations européennes pourraient fermer. Même une hausse de 2°C mettrait en péril plus de la moitié d’entre elles. Si le thermomètre mondial grimpe de +4°C, près de 98% des stations européennes pourraient disparaître. La neige artificielle, souvent vue comme une solution, a ses limites. Elle nécessite beaucoup d’eau et d’énergie, augmentant ainsi l’empreinte carbone des stations, surtout dans les pays dépendant du charbon. 

Un enjeu économique majeur

Si le chiffre des 168 stations fermées en 2022 a fait le tour des médias, il est essentiel de le mettre en perspective. Beaucoup de ces « stations » étaient de petites installations, parfois juste une ou deux remontées mécaniques. En réalité, la France n’a perdu que 2% de son domaine skiable. De plus, les prévisions sur la disparition totale de la neige sont à prendre avec prudence. Selon Climsnow, une collaboration entre Météo-France, l’Inrae et Dianeige, chaque station est unique. L’altitude, l’orientation, la pente, et même la capacité à produire de la neige artificielle, jouent un rôle. Et si certaines années ont été catastrophiques pour le ski, comme 1964 à Megève ou 1969, les avancées technologiques ont souvent permis de compenser. 

L’Europe, leader mondial du ski, génère plus de 30 milliards d’euros chaque année. Rien qu’en France, les 250 stations de ski rapportent 10 milliards d’euros. La menace du réchauffement climatique pèse donc lourdement sur ces chiffres. Outre les pertes financières, des milliers d’emplois sont en danger. Les stations doivent s’adapter rapidement. Cela pourrait signifier diversifier leurs offres, investir dans des technologies plus vertes ou même repenser entièrement leur modèle économique. Les stations de ski, construites principalement dans les années 1960 et 1970, sont devenues des piliers économiques pour de nombreuses régions, générant environ 120 000 emplois et rapportant des millions aux collectivités grâce aux taxes sur les forfaits. Cependant, la dépendance à ces revenus a soulevé des préoccupations, notamment lorsque la Cour des comptes a exprimé ses inquiétudes en 2018. Face aux défis climatiques, certaines stations, dans une tentative désespérée de préserver leur attractivité, ont opté pour des mesures extrêmes, comme le largage de neige par hélicoptère à Luchon-Superbagnères. Parallèlement, la station du Puigmal, après une fermeture en 2013, a été relancée avec une approche différente : réduire la taille et les coûts, se concentrer sur une clientèle locale et diversifier les activités. Bien que novatrice, cette stratégie a suscité des interrogations quant à sa viabilité à long terme.

Quel avenir pour les stations de ski ? 

Valdrôme, autrefois une station de ski florissante, a connu un déclin abrupt après sa fermeture en 2015 par le conseil général de la Drôme. Aujourd’hui, la commune est confrontée à des défis majeurs, notamment l’isolement en hiver et le manque d’activités touristiques durables. Bien que le site soit classé Natura 2000, attirant des randonneurs en été, la ville est déserte en hiver. Le maire, Jean Aramburu, évoque diverses initiatives pour revitaliser la région, notamment le tourisme axé sur l’astronomie et la nature, mais reste sceptique quant à leur succès. De son côté, Julie Mazet, responsable du service tourisme à la communauté de communes du Büech-Dévoluy, souligne l’absence d’un modèle clair pour l’après-ski. Bien que le concept de tourisme « quatre saisons » soit promu, elle estime que se reposer uniquement sur des activités de plein air comme la randonnée ou le vélo n’est pas une solution viable à long terme. 

Face à ces défis, différentes stations cherchent des alternatives pour maintenir une activité économique. Le groupe Rossignol a introduit un concept d’expériences en plein air, tandis qu’en Autriche, la commune de Sankt Corona am Wechsel a remplacé ses remontées mécaniques par des tire-VTT. Cependant, la question demeure : faut-il vraiment remplacer le ski par une autre activité touristique ? Julie Mazet suggère que le terme « reconversion » lui-même est problématique. Philippe Bourdeau, professeur à l’Institut d’urbanisme et de géographie alpine de l’université Grenoble-Alpes, propose une approche radicalement différente : sortir du modèle basé uniquement sur le tourisme. Pour lui, la solution réside dans la création d’une économie locale robuste, indépendante du tourisme de masse, avec des services essentiels tels que des médecins, des écoles et des commerces fonctionnant toute l’année. 

Stéphanie Monet

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010, j'ai créé deux sites Mon Totem, accès sur du contenu positif orienté sur l'écologie, et Penser Demain, rassemblant des sujets sur le monde que nous souhaitons créer demain.

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